LA TRADITION

DE NOEL

DANS LES FAMILLES PROVENCALES

Couverture du PETIT MARSEILLAIS de Noël 1910

LA TRADITION DE NOEL DANS LES FAMILLES PROVENCALES,

Le grand soir du réveillon, toutes les familles provençales se trouvaient réunies pour célébrer dans la joie la fête de la nativité.

Mais avant de se mettre à table on enflammait la fameuse bûche de Noël appelée cacho-fuech, calignau ou calendeau. Elle représentait le symbole des feux que l'on faisait antérieurement encore pour célébrer la fête du solstice d'hiver.

Les provençaux attachaient beaucoup d'importance à cette bûche de bois qu'ils choisissaient de chêne ou d'olivier quelques jours avant le réveillon.

Une fois la bûche choisie, on la traitait avec égard, et celui qui avait l'imprudence de s'asseoir dessus était bientôt couvert de furoncles !

C'était l'aïeul et le plus jeune enfant qui enflammaient le calignau, tous deux symboles de la vieille année qui s'achevait et de la nouvelle qui commençait.

Toute la famille se découvrait alors et faisait le signe de croix tandis que l'enfant près du feu recevait des mains de son grand-père un verre de vin cuit dont il devait asperger la bûche enflammée à trois reprises en prononçant les formules sacramentelles que lui soufflait son aïeul à l'oreille : "Se siam pas mai, que siéguem pas mens !" (Si nous ne sommes pas davantage, que nous ne soyons pas moins !).

Cela fait, on se préparait à partager lou gros soupar (le repas de réveillon).

Selon l'usage, la table était couverte de trois nappes superposées sur lesquelles on avait disposé treize petits pains ornés de branches de myrte.

On faisait maigre, jadis au gros soupar, mais on servait en revanche une fameuse capilotade de morue dite raïto avec des choux-fleurs ou des artichauts.

En Camargue, le menu traditionnel était : carde aux olives, cardon, céleri, escargots, fougasse, confiture d'Apt, et bocal de cerises. Le repas du réveillon était des plus joyeux, et tous les convives y allaient de leur personne pour raconter les histoires les plus désopilantes et faire les farces les plus remarquables.

Ce qui frappait le plus, dans les mets du gros soupar, était l'abondance des desserts. Si l'on faisait maigre, jadis au cours du réveillon, on ne se privait pas de sucreries.

Avant de les servir, on retirait la première des trois nappes qui couvraient la table, fruits secs, confitures, biscuits, sucreries, nougat. Parmi les gâteaux figuraient les poumpos taillados, les fameuses fouaces provençales que l'on préparait à Noël.

Lou gros soupar était arrosé du meilleur vin cuit de la maison, celui qu'on avait fait à la dernière vendange en prévision des fêtes de Noël.

Après avoir mangé, bu et chanté des noëls à gorge déployée, on quittait la table pour se rendre à la messe de minuit.

 

La Cambo me fai mau est un chant de Noël écrit par Nicolas Saboly, et très connu en Provence. Il raconte l'histoire d'un berger qui demanda que l'on selle son cheval afin qu'il puisse aller saluer le petit Jésus, dans l'espoir de soulager un mal de jambe persistant

Le matin de Noël, les provençaux se revêtaient de leurs plus beaux atours pour se rendre à l'office du jour.

Maris et femmes ressortaient leurs costumes de mariage, et jeunes gens étrennaient leurs nouveaux vêtements. Après les dévotions d'usage, les provençaux se consacraient à la famille.

On se réunissait tous pour évoquer le passé, les ancêtres, et les grands événements familiaux.

Le soir du 25 décembre, on faisait à nouveau un festin où la viande cette fois entrait pour une large part. Le chef de famille découpait la fameuse dinde de Noël.

On dit qu'en Provence, l'usage de manger de la dinde à Noël remonterait au roi René, quoique l'oiseau aurait été rapporté d'Amérique ultérieurement.

Après le repas, on se regroupait autour du foyer où l'aïeul contait une belle histoire pleine de sagesse à l'intention de la jeunesse qui  l'écoutait, suspendue à ses lèvres.